• La politique en matière de violence conjugale

    La mise en place d’une telle politique permet de soutenir les victimes de violence conjugale. Afin de leur assurer la meilleure protection possible, cette politique doit contenir différentes mesures qui devraient faire l’objet de clauses de convention collective.

    Les éléments à y inclure

    ⦁ La volonté de l’employeur de lutter contre la violence conjugale et de protéger son personnel

    ⦁ Les actions de sensibilisation qui visent les membres du personnel

    ⦁ La nomination d’une personne-ressource qui aura la responsabilité des dossiers en la matière au sein de l’entreprise

    ⦁ Le déploiement d’un plan de sécurité lors des situations à risque

    ⦁ La mise en place de mesures visant à garantir la confidentialité de ces dossiers

    ⦁ Les mesures d’accompagnement qui seront mises en place pour les victimes

    ⦁ Des libérations et une formation adéquate des personnes en responsabilité syndicale qui s’occuperont des victimes

    ⦁ Des journées de congé ainsi que de la flexibilité au travail pour les personnes vivant de la violence conjugale, lorsque nécessaire

    Un modèle pour vous outiller

    En 2020, le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) de la région de la Côte-Nord, le Centre Femmes aux 4 Vents et la Maison des femmes de Baie-Comeau ont travaillé ensemble pour produire une trousse d’accompagnement pour les milieux de travail.

    Le modèle de politique présenté ci-dessous est issu de ce travail. Il peut être adapté afin de répondre aux réalités de votre milieu.

  • Le plan d'accompagnement

    Vous soupçonnez qu’une personne dans votre milieu de travail est victime de violence conjugale? Une rencontre avec elle est à privilégier. Vous pourrez ainsi convenir de la mise en place d’un plan d’accompagnement qui contiendra des mesures pour la soutenir.

    À noter que le plan d’accompagnement doit précéder la mise en place d’un plan de sécurité.

    Avant la rencontre

    Rencontrer une victime de violence conjugale demande de la préparation. Voici ce qui devrait être fait :
    ⦁ Fixer la rencontre à un moment opportun pour la victime;
    ⦁ Choisir un endroit calme qui assure la confidentialité;
    ⦁ Réunir tous les documents qui pourraient être utiles lors de la rencontre (liste de ressources disponibles, liste de mesures d’accompagnement.

    Pendant la rencontre

    Au moment de rencontrer la victime, adoptez une position d’écoute et de bienveillance, et faites preuve d’ouverture.

    Selon le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, différentes étapes devraient être franchies au cours de la discussion.

    1. Établissez le contact en assurant le respect et la confidentialité.

    • « Je suis contente/content que l’on prenne le temps de discuter de ce sujet ensemble, même s’il reste délicat. Je vous assure que cet échange demeurera confidentiel. »


    À noter :
    vous pouvez lever la confidentialité de votre échange seulement en cas de risque grave imminent pour la personne impliquée ou pour quelqu’un d’autre.

    2. Précisez l’objectif de la rencontre.

    • « Mon intention aujourd’hui est de vous faire part de mes inquiétudes et de voir comment je peux vous soutenir. Avez-vous des attentes particulières pour la rencontre? »


    3. Nommez et validez vos perceptions et vos responsabilités en parlant au « je ».

    • « J’ai vu votre partenaire à plusieurs reprises sur les lieux du travail dans les dernières semaines. Je m’inquiète pour vous. Est-ce que tout va bien? »
    • « Dans notre syndicat, nous avons à cœur le bien-être de nos membres et nous voulons les soutenir en cas de difficulté. Nous croyons que personne ne devrait, sous aucun prétexte, vivre de la violence. Nous sommes également soucieux de votre sécurité lorsque vous êtes au travail. »


    4. Invitez la victime, si elle le souhaite, à raconter son histoire.

    • « Est-ce que vous voulez en parler? »


    À noter :
    si la personne ne souhaite pas en parler, présentez-lui la liste des ressources d’aide disponibles et indiquez-lui qu’elle peut revenir vous en parler quand elle le décidera. Faites un suivi régulier auprès d’elle pour vous assurer qu’elle va bien. Vous pouvez aussi utiliser l’arbre décisionnel pour vous guider davantage.

    5. Écoutez la personne et respectez ses décisions.

    • « Cela ne doit pas être facile. »
    • « Je respecte vos choix et vos décisions. »
    • « Je vous crois. »


    6. Offrez-lui votre soutien et présentez-lui les mesures d’accommodement disponibles ainsi que la liste des ressources spécialisées.

    • « Est-ce que je peux faire quelque chose? »
    • « Avez-vous des attentes particulières concernant le rôle du syndicat dans cette situation? »
    • « Est-ce qu’il y a des mesures parmi celles présentées qui seraient utiles pour vous? »


    7. Dirigez la victime vers des ressources spécialisées.

    • « Les maisons d’aide et d’hébergement peuvent vous soutenir et vous accompagner, peu importe ce que vous décidez. »


    Un outil de dépistage des risques

    Lors de cette rencontre, vous pouvez proposer à la victime de remplir avec vous l’outil de dépistage des risques conçu par l’Université Western, le Congrès du travail du Canada et de l’Association des Employeurs des transports et communications de régie fédérale. (ETCOF). Il permet de déterminer s’il est nécessaire ou non de mettre en place un plan de sécurité.

    L’outil est disponible gratuitement (dvatwork.ca/fr ).

    Vous devez d’abord créer un profil afin d’y accéder.

  • Le plan de sécurité

    Avant de mettre en place un plan de sécurité, il importe de faire une évaluation des dangers. Le plan de sécurité est nécessaire lorsque des risques sont présents tant pour la victime que pour ses collègues.

    Facteurs et signes de danger
    Il existe plusieurs facteurs associés aux cas de féminicides et plusieurs signes de danger imminent qu’un tel drame survienne.

    En voici des exemples :

    Facteurs associés aux cas de féminicides
    • Présence d’antécédent de violence conjugale dans le couple
    • Rupture
    • Perte d’emploi de l’agresseur

    Signes de danger imminent de féminicide
    • Rupture dans la dernière année
    • Récupération des effets personnels au domicile de l’agresseur à la suite de la rupture
    • Escalade des épisodes de violence conjugale au cours de la dernière année
    • Accès à une arme à feu pour l’agresseur
    • Utilisation, dans le passé, d’une arme à feu pour menacer la victime
    • Menaces de mort envers la victime ou les enfants
    • Présence de harcèlement pendant la relation ou à la suite de la rupture
    • Consommation de drogue ou d’alcool chez l’agresseur
    • Tentative de contrôle sur l’ensemble de la vie de la victime ou incapacité pour l’agresseur d’exercer ce contrôle
    • Tentative de suicide passée ou menace de suicide de la part de l’agresseur

    Évaluation des risques
    Avant de mettre un plan de sécurité en place, il importe d’évaluer les dangers. Passez en revue, avec la victime, la liste des facteurs de risques et des signes de dangers imminents ou utilisez l’outil de dépistage des risques offert gratuitement en ligne.

    Élaboration du plan
    Si l’évaluation des risques indique la nécessité de mettre en place un plan de sécurité, vous devez communiquer avec une ressource ou un organisme d’aide spécialisé en matière de violence conjugale. Leur personnel vous soutiendra dans l’élaboration de ce plan. Le tout doit se faire avec l’accord formel de la victime.

    Trois étapes sont prévues pour l’élaboration du plan de sécurité, qui doit prévoir les éléments suivants :

    1. Avant la mise en place du plan de sécurité
    • Nommer une personne responsable de la mise en œuvre du plan.
    • Développer le plan avec le soutien d’une ressource ou d’un organisme d’aide spécialisé en matière de violence conjugale.

    2. Au moment de la rencontre avec la victime
    • Aviser la victime que la souplesse sera de mise ainsi que l’adaptation du plan afin d’assurer sa sécurité et celle de ses collègues.
    • Informer la victime qu’elle peut prévoir un plan de sécurité pour la maison si elle le souhaite avec l’aide de la ressource ou de l’organisme d’aide spécialisé.
    • Déterminer les mesures à mettre en place dans le milieu de travail afin que toutes et tous soient protégés, et ce, en collaboration avec la victime.

    3. Après l’élaboration du plan de sécurité
    • Déterminer les personnes qui auront accès au plan de sécurité.
    • Assurer la confidentialité de ce plan et de l’ensemble du dossier.
    • Prévoir des mécanismes pour faire les suivis nécessaires du plan, afin d’y apporter les ajustements nécessaires.

     

  • Liste des mesures d’accompagnement

    La liste des mesures d’accompagnement possibles doit, idéalement, avoir été prévue par l’employeur avant d’être proposée à la victime. Cette dernière doit également être consultée avant que ces mesures soient inscrites dans son plan de sécurité.

    Mesures financières

    ⦁ Offrir des congés payés ou sans solde pour permettre à la victime d’obtenir du soutien, de préparer son départ, de consulter une ou un médecin ou une avocate ou un avocat, etc.
    ⦁ Offrir une aide financière d’urgence.

    Mesures numériques

    ⦁ Modifier le numéro de téléphone au travail, le numéro de poste ou l’adresse courriel de la victime.
    ⦁ Désactiver la localisation des appels sur le téléphone de la personne.
    ⦁ Préprogrammer le numéro de la police ou d’une maison d’hébergement sur le téléphone de la victime.
    ⦁ Recueillir les messages et les courriels offensants envoyés par l’agresseur qui pourraient servir de preuve pour des procédures judiciaires.
    ⦁ Supprimer toute référence au nom et à l’emplacement de la victime sur le site de l’entreprise, les médias sociaux, etc.

    Mesures de sécurité physique

    ⦁ Éloigner le poste de travail de la victime des zones visibles par le public.
    ⦁ Autoriser la victime à entrer dans les bureaux par une autre porte, moins visible que celle de l’accueil.
    ⦁ Mettre en place un système de covoiturage.
    ⦁ S’assurer qu’une agente ou un agent de sécurité accompagne la personne jusqu’à son auto, son vélo, l’arrêt d’autobus ou la station de métro.
    ⦁ Choisir une ou un collègue de travail qui pourra aider la victime à se mettre à l’abri rapidement en cas de menace.
    ⦁ Vérifier auprès de la victime s’il y a une ordonnance d’interdiction de contact et, dans un tel cas, prévenir la police si l’agresseur se présente sur les lieux de travail.

    Mesures touchant l’organisation du travail

    ⦁ Demander aux collègues de ne fournir aucun renseignement personnel sur la personne.
    ⦁ Choisir un mot ou une phrase clé que la victime pourra utiliser si elle est en danger ou si elle a besoin d’aide.
    ⦁ Apporter des changements dans les tâches que la victime effectue.
    ⦁ Remettre aux personnes responsables de l’accueil une photo et une description de l’agresseur ainsi que la marche à suivre pour tenter d’éviter qu’il entre sur les lieux.
    ⦁ Permettre une certaine flexibilité dans l’horaire de la victime.
    ⦁ Permettre que la victime rencontre la police, des personnes intervenantes ou encore une avocate ou un avocat pendant ses heures de travail.
    ⦁ Proposer d’accompagner la victime dans une maison d’aide et d’hébergement pendant ses heures de travail.
    ⦁ Permettre que la victime revienne progressivement au travail.
    ⦁ Offrir la possibilité de laisser un bagage d’urgence au travail dans l’éventualité où la victime aurait à quitter les lieux rapidement.
    ⦁ Déterminer, avec la victime, une personne de référence (membre de la famille, amie ou ami, collègue, etc.) avec qui prendre contact en cas de besoin.
    ⦁ Prendre contact régulièrement avec la victime afin de s’enquérir de sa situation.
    ⦁ Aviser d’autres collègues, si nécessaire, du risque de violence conjugale en milieu de travail.

  • Exemple de courriel type

    Voici un exemple de courriel type qui peut être envoyé par le syndicat à l’ensemble des membres.

    Bonjour à toutes et à tous,

    La violence conjugale a malheureusement fait les manchettes dans les dernières années avec la hausse des féminicides observée au Québec. Il ne s’agit ici que de la pointe de l’iceberg puisque chacun de ces féminicides cache des milliers de victimes.
    Ensemble, nous avons le pouvoir d’agir contre la violence conjugale.

    Votre syndicat est là si vous vivez de la violence conjugale et que vous souhaitez obtenir des conseils et du soutien.

    Votre syndicat est là si vous soupçonnez que votre collègue subit de la violence conjugale.

    De plus, voici différentes ressources disponibles :

    SOS violence conjugale (1 800 363-9010);

    Milieux de travail alliés contre la violence conjugale (milieuxdetravailallies.com);

    AGIR ENSEMBLE – La violence conjugale, c’est aussi notre affaire!, pour trouver une ressource spécialisée dans la région (lacsq.org/violence-conjugale);

    Maisons d’aide et d’hébergement (fmhf.ca ou maisons-femmes.qc.ca).
    Que vous cherchiez de l’aide auprès d’une ressource ou de votre syndicat, la confidentialité de votre situation sera toujours assurée.

    Vous n’êtes pas seule ou seul : nous sommes là pour vous!

    [Signature du syndicat]