La Loi sur l’équité salariale a été adoptée en 1996 dans le but de corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique envers les catégories d’emplois à prédominance féminine. L’objectif visé par la Loi : faire en sorte que les femmes reçoivent un salaire égal pour un travail équivalent à leur comparable masculin dans la même entreprise.

Qu’en est-il?

En mai 2018, la Cour suprême du Canada a statué que le législateur québécois devait modifier certains éléments de la Loi sur l’équité salariale portant sur le maintien de l’équité salariale. La Cour a notamment obligé le législateur à s’assurer que les ajustements salariaux sont rétroactifs à la date du changement significatif dans la catégorie d’emplois visée, et ce, selon la périodicité aux cinq ans. La Cour l’a également obligé à modifier l’affichage des résultats afin que celui-ci présente davantage d’informations permettant aux personnes salariées de comprendre les résultats de l’exercice affiché.

En réponse à cette décision, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, a déposé, le 12 février 2019, le projet de loi no 10 modifiant la Loi sur l’équité salariale afin principalement d’améliorer l’évaluation du maintien de l’équité salariale.

La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) a rédigé un mémoire intitulé Une équité à maintenir sans compromis et a participé à la commission parlementaire, où elle a fait plusieurs recommandations. Le 10 avril 2019, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi.

Les nouveaux éléments

La nouvelle législation comprend plusieurs éléments nouveaux concernant le maintien de l’équité salariale, dont les principaux sont :

  • L’implication des personnes salariées dans un processus de participation avant l’affichage du maintien de l’équité salariale;
  • L’affichage des résultats;
  • La correction des écarts salariaux à la date de l’événement;
  • L’encadrement du traitement des plaintes (conciliation obligatoire);
  • Les modalités de versement pour les personnes salariées ayant quitté l’entreprise.

Les dates importantes

MAINTIEN 2010

  • 20 décembre 2010 : premier affichage
  • 18 avril 2011 : deuxième affichage
  • Mai 2011 : dépôt de plaintes à la CNESST[1] (Commission) par les associations accréditées et les personnes salariées
  • 2013 : début du processus de conciliation
  • De 2013 à 2017 : plusieurs rencontres de conciliation en présence de la CNESST, du Conseil du trésor et des organisations syndicales (APTS[2], FTQ[3], CSN[4], CSQ, SPDNQ[5], SPGQ[6] et FIQ[7])
  • 2017 : conciliation levée par la Commission
  • Avril 2018 : début de l’enquête par la vice-présidente à l’équité salariale (Commission)
  • Avril 2019 : enquête en cours suspendue par la Commission, à la suite des modifications apportées à la Loi

MAINTIEN 2015

  • 21 décembre 2015 : premier affichage
  • 21 mars 2016 : deuxième affichage
  • Mai 2016 : dépôt de plaintes à la Commission par les associations accréditées et les personnes salariées
  • En 2016-2017 : portrait complet remis à la CSQ par la Commission concernant les plaintes de 2010 et 2015, et ce, par fédération. La Commission nous informe que les plaintes du maintien 2015 seront traitées dans un deuxième temps, soit après les plaintes du maintien 2010.

Réponses aux questions fréquentes

PROCESSUS DE PARTICIPATION AU MAINTIEN DE L’ÉQUITÉ SALARIALE

  • Quel est le nouveau processus de participation inscrit dans la Loi?

Si l’employeur a formé un comité d’équité salariale pour établir un programme d’équité salariale ou s’il y a une association accréditée dans l’entreprise, il doit rencontrer (s’il réalise seul le maintien de l’équité salariale) les personnes suivantes :

  • la représentante ou le représentant des personnes salariées non représentées par une association accréditée;
  • les représentantes et les représentants des associations accréditées.

L’employeur doit leur transmettre les renseignements ou les documents concernant les travaux d’évaluation du maintien.

Les représentantes et représentants peuvent transmettre les renseignements ou les documents tout en s’assurant de respecter la confidentialité des informations qu’ils livrent. Les membres doivent aussi assurer la confidentialité des informations qu’ils reçoivent. Des pénalités légales, à ce sujet, sont imbriquées dans la loi modifiée.

La représentante ou le représentant des personnes salariées non représentées par une association accréditée, désigné par celles-ci, et les représentantes et représentants des associations accréditées peuvent questionner l’employeur, lui faire part de leurs observations, de leurs préoccupations, de leurs opinions ou de leurs suggestions.

  • Quand le processus de participation a-t-il lieu?

L’employeur doit réaliser ce processus avant d’effectuer l’affichage des résultats. Ce processus doit être complété au plus tard 60 jours avant l’affichage.

  • Quels renseignements l’employeur devra-t-il fournir?

Pour l’instant, nous ne connaissons pas exactement les renseignements que l’employeur devra fournir. La Commission émettra peut-être une directive à ce sujet. L’employeur pourrait transmettre des informations ayant servi à réaliser son évaluation du maintien. Ces éléments pourraient correspondre à ceux qui seront inscrits dans l’affichage.

AFFICHAGE DES RÉSULTATS

  • Quelles informations devront être indiquées dans l’affichage?

Les éléments suivants sont ajoutés aux informations qui doivent être incluses dans l’affichage des résultats :

  • Un sommaire des questions posées et des observations présentées dans le cadre des mesures de consultation du processus de participation, le cas échéant, ainsi qu’un sommaire exposant la manière dont elles ont été considérées;
  • Pour chacun des événements identifiés, leur date de début et, le cas échéant, de fin ou, à défaut, un avis indiquant qu’aucun ajustement n’est requis;
  • Les modalités de versement (étalement de la somme forfaitaire), le cas échéant.
  • Comment la correction des écarts salariaux se fera-t-elle?

Le correctif salarial doit être rétroactif à la date où le changement significatif dans l’emploi est survenu.

Pour la période précédant l’affichage du maintien, l’employeur doit verser une somme forfaitaire rétroactive à la date de l’événement. Par exemple, si l’événement modifiant l’évaluation a eu lieu le 21 octobre 2018, l’employeur devra, lors du maintien 2020, verser une somme forfaitaire à chaque salariée et salarié de la catégorie d’emplois visée à cette date. Le salaire sera ensuite corrigé s’il subsiste un écart salarial discriminatoire au moment du nouvel affichage. Des intérêts au taux légal s’appliquent si l’employeur choisit d’étaler la somme forfaitaire.

  • La somme forfaitaire est-elle applicable au RREGOP[8]?

Oui, cette somme constitue de la rémunération au moment de son versement et devra être considérée aux fins de l’application des régimes d’avantages sociaux, dont le RREGOP.

  • Si la personne salariée quitte l’entreprise et qu’un ajustement salarial ou une somme forfaitaire aurait dû lui être versé, y aura-t-elle droit quand même?

L’employeur a l’obligation de verser l’ajustement salarial ou la somme forfaitaire, incluant les intérêts légaux s’il y a lieu, à la personne salariée ayant quitté l’entreprise. Dans ce cas, il doit verser le tout en un montant global. Il doit également aviser la personne par écrit.

  • Qu’arrivera-t-il si le total de la somme forfaitaire étalée n’a pas fini d’être versé lorsque la personne quitte l’entreprise?

L’employeur devra verser le solde de la somme forfaitaire qui est due à la personne en incluant les intérêts légaux, et ce, dans les 15 jours suivant le départ de celle-ci.

MAINTIEN DE L’ÉQUITÉ SALARIALE 2010

  • Avec les nouvelles dispositions de la Loi, qu’arrivera-t-il avec les plaintes pour le maintien 2010?

Jusqu’en avril 2019, les plaintes du maintien 2010 étaient en processus d’enquête à la Commission. Depuis l’adoption de la nouvelle loi, ces enquêtes ont été suspendues. Un processus de conciliation d’une durée de 120 jours, qui pourra être prolongé de 60 jours, devrait commencer.

À la fin de ce délai, il est toujours possible de conclure une entente tant et aussi longtemps que la Commission n’aura pas rendu de décision.

  • La Commission peut-elle regrouper les plaintes lors de la conciliation?

Oui, elle peut regrouper des plaintes si elles ont le même fondement juridique, reposent sur les mêmes faits ou soulèvent les mêmes points de droit ou encore si les circonstances s’y prêtent. Si elle le fait, un accord peut être conclu et signé par au moins une association accréditée concernée et l’employeur. Il doit également, au plus tard 30 jours après sa conclusion, être entériné par une ou des associations accréditées représentant, pour chaque catégorie d’emplois visée, une majorité de salariés. Il est ensuite signé par la conciliatrice ou le conciliateur.

Si un accord est conclu, la plainte provenant d’une association accréditée n’est plus valide puisque l’accord de conciliation convenu avec l’association majoritaire prévaut. Cela vaut aussi pour les plaintes où l’association accréditée a été mandatée pour représenter la personne salariée. Une personne salariée plaignante pour qui aucun mandat n’a été donné peut se désister de cette entente en informant la Commission.

  • De quelle façon une personne ayant déposé une plainte individuelle sera-t-elle informée qu’un accord a été conclu avec la ou les associations accréditées représentant la majorité des personnes salariées?

La Commission informe par écrit la personne salariée ayant déposé une plainte individuelle (qui n’a pas donné de mandat de représentation à l’association accréditée). Cette personne aura 30 jours, après avoir été informée, pour manifester par écrit à la Commission son intention de ne pas être liée par l’accord. Dans ce cas, la plainte sera maintenue et elle suivra son cours.

  • Quelle est la date de rétroaction d’ajustement salarial, s’il y a lieu, concernant les plaintes de maintien 2010?

S’il y a un ajustement salarial, il y aura rétroactivité au 31 décembre 2010, incluant les intérêts légaux, comme le prévoit la Loi sur l’équité salariale.

MAINTIEN DE L’ÉQUITÉ SALARIALE 2015

  • Avec les nouvelles dispositions de la Loi, qu’adviendra-t-il des plaintes pour le maintien 2015?

Une conciliatrice ou un conciliateur sera désigné lorsque les délais applicables pour la conciliation des plaintes de maintien 2010 seront expirés. Par la suite, un processus de conciliation d’une durée de 120 jours, qui pourra être prolongé de 60 jours, débutera.

À la fin de ce délai, il sera toujours possible de conclure une entente, tant que la CNESST n’aura pas rendu de décision. La Commission pourra aussi regrouper des plaintes concernant une même catégorie d’emplois. Le même processus de traitement des plaintes de maintien 2010 s’appliquera aux plaintes de maintien 2015.

  • Quelle est la date de rétroaction, s’il y a lieu, concernant les plaintes de maintien 2015?

S’il y a un ajustement salarial, il y aura rétroactivité au 21 mars 2016, incluant les intérêts légaux, comme prévu à la Loi sur l’équité salariale.

MAINTIEN DE L’ÉQUITÉ SALARIALE 2020

  • Qu’arrivera-t-il pour le maintien 2020?

L’employeur devra normalement procéder à un affichage au plus tard en décembre 2020. S’il décide de procéder seul au maintien, il devra enclencher le processus de participation prévu dans la Loi. Cet exercice doit être complété 60 jours avant l’affichage des résultats.

L’employeur pourrait également procéder à l’exercice de maintien en formant un comité de maintien de l’équité salariale. À ce moment, les différentes associations accréditées concernées participeraient à ce comité. Selon la Loi, la CSQ y détient deux sièges.

Si l’employeur procède seul, les personnes salariées et les associations accréditées pourront déposer des plaintes concernant la conformité du processus. La Commission enclenchera le traitement de ces plaintes.

Si l’employeur met en place un comité de maintien de l’équité salariale, il ne pourra y avoir de plainte concernant la conformité de travaux, mais seulement concernant la mauvaise foi, l’agissement arbitraire, discriminatoire ou la négligence grave du comité de maintien.

  • Comment déposer une plainte?

Si une association accréditée ou une personne salariée désire déposer une plainte concernant l’exercice de maintien 2020, cela devra obligatoirement être fait à l’aide du formulaire de plainte qui se trouve sur le site de la Commission à l’adresse suivante : ces.gouv.qc.ca/asp/formulaire-plainte.asp.

Quelles sont les actions de la CSQ?

Outre son mémoire, la CSQ prévoit transmettre ses recommandations au ministre du Travail lors du dépôt du bilan de l’application de la Loi, prévu le 28 mai 2019. De plus, un plan d’action et de communication a été adopté afin de réaliser une campagne d’information et de sensibilisation auprès de nos membres.

[1]   Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail.

[2]   Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux.

[3]   Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

[4]   Confédération des syndicats nationaux.

[5]   Syndicat professionnel des diététistes et nutritionnistes du Québec.

[6]   Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec.

[7]   Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec. Cette organisation a été présente de 2013 à 2015.

[8]   Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics.