Actualités, Enseignement supérieur

Quelle place occupe le français en enseignement supérieur?

23 mars 2023

Publication d’un rapport du LIRES

Si l’anglais est bien présent dans les publications scientifiques, le français demeure vivant dans le milieu de l’enseignement des sciences aux études supérieures.

Au Québec, la protection de la langue française représente un enjeu social et identitaire majeur. Or, peu d’études ont tenté de brosser un portrait général de la place relative du français en recherche et en enseignement, et ce, tant dans les collèges que dans les universités de la province.

Une vaste enquête menée par le Laboratoire interdisciplinaire de recherche sur l’enseignement supérieur (LIRES) et financée par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), grâce à une subvention du ministère de la Langue française, s’est toutefois penchée sur la question.

La science s’enseigne en français

Les résultats de la recherche, présentés dans le cadre du FranColloque les 16 et 17 mars 2023, révèlent que la science s’enseigne et s’étudie en français au Québec. Puisque la protection de cette langue représente un enjeu social et identitaire majeur, les politiques gouvernementales et institutionnelles aident à préserver le caractère francophone de l’enseignement, selon l’étude.

La documentation utilisée pour préparer les cours et les ouvrages obligatoires que doivent lire les étudiantes et étudiants du cégep et de l’université sont principalement en français. « Oui, on privilégie les ressources pédagogiques en français, en autant qu’elles soient disponibles », a toutefois nuancé, lors du FranColloque, Cathia Papi, professeure titulaire au Département d’éducation de l’Université TÉLUQ et co-auteure du rapport de recherche.

Une pression soutenue

La place du français dans les établissements d’enseignement québécois est tout de même soumise à une pression soutenue face à la montée de l’anglais dans les échanges scientifiques. D’ailleurs, « la majorité des publications scientifiques sont en anglais », a rappelé le scientifique en chef du Québec et président d’honneur du FranColloque, Rémi Quirion, dès l’ouverture de l’évènement.

Ainsi, « le pourcentage d’articles en anglais [dans les publications scientifiques] est passé de 64 % à plus de 90 % à l’échelle mondiale » entre 1995 et 2019 et « le français a, quant à lui, régressé d’un peu moins de 10 à 1 % », apprend-on dans une lettre publiée dans La Presse+ en février dernier et coécrite par l’un des panélistes du FranColloque, le directeur scientifique adjoint de l’Observatoire des sciences et des technologies, Vincent Larivière. En sciences médicales et naturelles, c’est 100 % des articles publiés qui sont en anglais, est-il également mentionné.

Selon le rapport du LIRES, les chercheuses et chercheurs sont incités à publier en anglais parce qu’ils savent que leurs travaux bénéficieront ainsi d’une diffusion plus large, ce qui renforce le capital scientifique de leurs recherches en termes de rayonnement et de référencement.

« Et comme la majorité des revues scientifiques sont en anglais, cette pression est ambiante et traverse plusieurs éléments de la carrière professorale », indique l’étude.

Une tendance qui crée des iniquités

Dans certains domaines, par exemple en sciences médicales et naturelles et en génie, des professeures et professeurs rencontrés dans le cadre de l’étude ont mentionné ne pas avoir le choix de proposer de la documentation ou des ouvrages en anglais afin que les étudiantes et étudiants puissent bénéficier des connaissances les plus à jour.

« Cela crée toutefois des iniquités parce que la maitrise de l’anglais n’est pas une condition d’admission pour entrer au cégep ou [dans une] université francophone. Mais là, on oblige [les étudiantes et étudiants] à maîtriser l’anglais pour avoir accès [aux connaissances] », affirme l’un des coauteurs de l’étude du LIRES et professeur adjoint à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal, Olivier Bégin-Caouette, dans un reportage diffusé par Noovo info.

 Quelles solutions?

Pour contrer le déclin du français en enseignement supérieur, il n’y a pas de solutions simples, selon Olivier Bégin-Caouette. Le rapport du LIRES propose toutefois certaines pistes de réflexion, comme donner du financement pour que toutes les revues scientifiques bilingues canadiennes traduisent systématiquement tous les articles dans une langue et dans l’autre ou encore financer les institutions afin qu’elles permettent aux professeures et professeurs de dégager du temps pour produire, eux-mêmes, les versions françaises des ouvrages.

L’étude est disponible en ligne

Le rapport de recherche du LIRES, La place du français en enseignement supérieur au Québec, est accessible en ligne.