Montréal, le 7 novembre 2025 — La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) s’inquiète du projet de loi no 94 tel qu’adopté récemment en raison de ses répercussions probables sur le personnel de l’éducation.

« Bien que ses objectifs déclarés — défendre la laïcité dans le réseau de l’éducation et améliorer la qualité des services éducatifs — sont tout à fait légitimes pour la Centrale, les moyens proposés pour les atteindre risquent d’avoir des effets délétères sur le personnel, sur la cohésion sociale et sur la qualité même des services offerts à la population », affirme Pascal Côté, troisième vice-président de la CSQ.

Accentuer la pénurie de la main-d’œuvre

Les effets de l’interdiction du port de signes religieux pour l’ensemble du personnel du réseau scolaire seront plus durement vécus par les femmes immigrantes, les musulmanes et celles qui occupent des emplois plus précaires.

En effet, les femmes immigrantes appartenant à des minorités culturelles sont nombreuses à travailler dans les services publics et elles occupent souvent des emplois essentiels à la prestation et à la qualité des services, mais dans des postes plus précaires : préposées à l’entretien ménager, préposées aux bénéficiaires, aides à la classe ou à domicile, éducatrices en services de garde en milieu scolaire et en services éducatifs à la petite enfance, notamment. Aussi, la Centrale aurait préféré un moratoire sur une telle interdiction, afin de bien prendre le temps d’évaluer l’incidence de la mesure dans le contexte actuel.

Favoriser la démobilisation

Plusieurs autres dispositions risquent d’entraîner des répercussions négatives sur les conditions de travail et favoriser les tensions dans le milieu. En généralisant quelques cas isolés, comme celui de l’école Bedford, et en y répondant par une série de mesures régressives, le gouvernement véhicule un message dévalorisant à l’égard du personnel de l’éducation. Cette approche jette un doute injustifié sur le professionnalisme et l’engagement de plus de 100 000 travailleuses et travailleurs qui, chaque jour, assurent la réussite éducative des élèves dans des conditions déjà difficiles.

Dans un contexte où plus de 2 400 postes demeurent toujours vacants dans le réseau scolaire, il est irresponsable d’imposer de nouvelles contraintes et d’ajouter à l’incertitude du personnel. Déjà fragilisé par la surcharge de travail, les compressions budgétaires et le manque de soutien, celui-ci a besoin de reconnaissance, de ressources et de stabilité… non pas de nouvelles restrictions.

Un canon pour tuer une mouche?

Les faits parlent d’eux-mêmes : à la suite de l’appel public du ministre de l’Éducation invitant à signaler les manquements à la laïcité, seuls 17 établissements, sur plus de 3 000, ont été visés, et les irrégularités recensées se comptent sur les doigts d’une main. Aucun problème systémique de prosélytisme ou d’atteinte à la neutralité religieuse n’a été constaté par le Protecteur national de l’élève, dont le rapport met plutôt en lumière des enjeux urgents liés au harcèlement et aux agressions sexuelles, ainsi qu’au manque de ressources pour y faire face.