Sept-Îles, le 28 mai 2014. – « Le climat de travail dans les établissements de santé de la Côte-Nord est de plus en plus lourd. Les travailleuses et travailleurs sont découragés, ayant l’impression que quoi qu’ils disent ou fassent, ils ne peuvent rien changer pour améliorer un système qu’ils jugent mal en point. C’en est rendu à un point où plusieurs ont d’ailleurs le sentiment que l’organisation pour laquelle ils travaillent est littéralement malade. »
La présidente du Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du Nord-Est québécois (SIISNEQ-CSQ), Nathalie Savard, a rendu public aujourd’hui en conférence de presse à Sept-Îles, ce portrait de l’état d’esprit de ses 500 membres, à la suite d’une enquête menée au cours des dernières semaines.
Accompagnée de la présidente de la Fédération de la santé du Québec (FSQ-CSQ), Claire Montour, Nathalie Savard a dévoilé les principales conclusions d’un questionnaire qui a été soumis aux syndicats affiliés au SIISNEQ-CSQ, sur la Côte-Nord.
« L’enquête confirme ce que nous dénonçons depuis un certain temps déjà : les travailleuses et travailleurs formés pour soigner les malades sont eux-mêmes en train de tomber de plus en plus malades parce qu’ils pratiquent leur profession dans un système lui-même malade. Face à la situation, les employeurs, plutôt que d’essayer d’apporter de véritables solutions aux problèmes, ne trouvent pas mieux que de contester les congés maladie des employés », dénonce Nathalie Savard.
Un climat de travail qui se détériore
La présidente du SIISNEQ-CSQ précise qu’il est devenu difficile de pouvoir compter sur une équipe de travail stable, étant donné le taux élevé d’absentéisme et le recours à la main-d’œuvre provenant du secteur privé.
« À travers notre enquête, plusieurs de nos membres ont décrié un climat de travail de plus en plus lourd, causé entre autres par la charge de travail qui augmente continuellement. En parallèle, les travailleuses et travailleurs se sentent déconsidérés par une direction qui juge qu’ils ne sont jamais assez bons, rapides et productifs. De plus, le manque de ressources fait en sorte que plusieurs sont constamment placés devant l’obligation de faire du temps supplémentaire. C’en est rendu que certaines ont peur d’entrer au travail, ne sachant pas quand elles vont pouvoir repartir », rapporte la leader syndicale.
Une pénurie de personnel généralisée
Ce manque de ressources s’explique notamment par une pénurie de personnel qui n’épargne aucun établissement de santé dans la région de la Côte-Nord.
« Le manque de personnel est généralisé à toutes les professions, soit les infirmières, les infirmières auxiliaires et les inhalothérapeutes. Pour de multiples raisons, il est devenu difficile de retenir le personnel en poste, alors qu’en même temps, le recrutement représente un énorme défi étant donné les conditions de travail peu attrayantes », analyse Nathalie Savard. Ainsi, pour ce qui est des infirmières seulement, il manque dans la région pas moins de 180 travailleuses.
Une charge de travail en augmentation
D’autre part, les membres du SIISNEQ-CSQ évaluent que leur charge de travail a considérablement augmenté au cours des cinq dernières années.
« Chaque personne doit traiter un plus grand nombre de dossiers. Les cas sont de plus en plus lourds et complexes. En même temps, les travailleuses et travailleurs doivent composer avec une diminution de ressources due aux compressions budgétaires », commente Nathalie Savard.
Un triste constat
La présidente du syndicat renchérit en faisant état d’un triste constat généralisé chez les membres.
« Toutes et tous ont l’impression que leur travail se transforme pour satisfaire des contraintes financières et politiques, négligeant d’autant notre réelle raison d’être, à savoir les soins aux patients. Nous nous éloignons donc de plus en plus des besoins de la population pendant qu’on nous impose des objectifs administratifs », clame la leader syndicale.
Manque de moyens
Nathalie Savard reconnaît que les employeurs veulent effectivement renoncer au recours à du personnel du secteur privé, mais estime qu’ils ne se donnent pas les moyens pour y parvenir.
« À défaut d’avoir un plan d’action pour y parvenir, on tombe continuellement dans le cercle vicieux de l’obligation du temps supplémentaire pour le personnel régulier, qui doit compenser pour le manque de ressources. On épuise donc à nouveau le personnel, qui se retrouve avec un taux élevé d’absentéisme ayant comme résultat qu’on doive recourir au secteur privé à nouveau. On tourne donc constamment en rond », ironise la présidente du SIISNEQ-CSQ.
Des conditions à revoir
Nathalie Savard termine en mentionnant qu’il faut se pencher rapidement sur les conditions nécessaires pour rendre à nouveau les professions attrayantes sur la Côte-Nord.
« Cela passe nécessairement par la mise sur pied d’un comité régional pour donner suite à une enquête faite par l’Agence régionale, à l’automne dernier, sur l’état actuel de la main-d’œuvre. Nous devons également revoir l’offre de postes à temps complet, la stabilisation des équipes de travail, ainsi que la révision des conditions liées à la disparité régionale. Et cela a un prix, qu’on le veuille ou non. De toutes façons, le recours à la main-d’œuvre privée représente des dépenses beaucoup plus élevées », conclut la présidente du SIISNEQ-CSQ.
Profil de la FSQ-CSQ
La Fédération de la Santé du Québec (FSQ-CSQ) représente près de 7 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et puéricultrices travaillant dans des établissements de tous les secteurs de la santé : centre hospitalier, centre de santé et de services sociaux (CSSS), centre de réadaptation, dispensaire, agence de la santé et des services sociaux, centre jeunesse et Héma-Québec.
Profil du SIISNEQ-CSQ
Le Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du Nord-Est québécois (SIISNEQ-CSQ) représente 1 250 membres infirmières et infirmiers, infirmières auxiliaires et infirmiers auxiliaires et inhalothérapeutes œuvrant dans 9 réseaux répartis dans les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Côte-Nord, de la Basse-Côte-Nord et du Nord-du-Québec.