À l’ouverture du Rendez-vous national sur la main-d’œuvre, les présidences des centrales syndicales québécoises lancent un message clair au gouvernement Couillard : la qualité de vie au travail doit être au cœur des moyens mis en œuvre dans une stratégie visant à assurer le développement économique du Québec et la prospérité de l’ensemble des Québécoises et Québécois.

À l’ouverture du Rendez-vous national sur la main-d’œuvre, les présidences des centrales syndicales québécoises lancent un message clair au gouvernement Couillard : la qualité de vie au travail doit être au cœur des moyens mis en œuvre dans une stratégie visant à assurer le développement économique du Québec et la prospérité de l’ensemble des Québécoises et Québécois.
Après près de trois années de ce gouvernement consacrées à l’austérité, les centrales syndicales accueillent favorablement l’ouverture au dialogue qui se concrétise par ce rendez-vous. Cependant, elles souhaitent que ce soit aussi l’occasion pour le gouvernement de Philippe Couillard de démontrer qu’il ne penche pas systématiquement du côté des employeurs, qui souhaitent orienter l’éducation selon leurs stricts besoins à très court terme, et qu’il prêtera une oreille attentive aux propositions du mouvement syndical.
Pour assurer un développement économique, les centrales syndicales plaident pour une relance des secteurs manufacturier et industriel, ainsi que pour la création d’emplois de qualité dans un contexte de développement durable. Le gouvernement du Québec doit se mettre en marche pour inciter les entreprises à investir en innovation, en recherche et en développement, et ce afin d’assurer la vitalité de l’économie québécoise. Les centrales rappellent également le rôle majeur des services publics comme moteur de développement économique, particulièrement en région, et soulignent que les problématiques de main-d’œuvre y sont aussi bien présentes, notamment en raison des mesures d’austérité des dernières années.
Le recul de la population en âge de travailler est préoccupant. De même, les impacts possibles des évolutions technologiques et de la lutte contre les changements climatiques sur les travailleuses et travailleurs et leur maintien en emploi doivent être au cœur des discussions. Toutefois, il faut préserver la mission des réseaux de l’éducation et de l’enseignement supérieur, qui doivent former les jeunes et les adultes pour qu’ils puissent s’épanouir afin de participer pleinement à la société. Le gouvernement doit s’assurer d’un financement qui leur permet de préserver leur mission, en maintenant une formation générale et une offre variée de programmes, et de jouer adéquatement leur rôle à cet égard dans toutes les régions du Québec. Restreindre leur mission aux seules préoccupations patronales limiterait profondément les compétences des jeunes et des adultes et leur mobilité dans une économie en constante évolution.
Le gouvernement Couillard doit impérativement considérer la question des conditions de travail et de la qualité de vie au travail des emplois actuellement disponibles. Il est faux de prétendre à une pénurie de main-d’œuvre qui serait liée strictement à un manque de compétences et de qualification des travailleuses et travailleurs. La qualité des emplois disponibles, le niveau de la rémunération, l’organisation du travail, les carences en santé et en sécurité du travail, notamment sur le plan de la santé mentale, l’existence de disparités de traitement dans la couverture de régimes de retraite dans certains milieux de travail, nuisent très certainement à la nécessité pour certains employeurs de combler les postes dans leurs entreprises.
En outre, l’adoption d’une loi-cadre sur la conciliation famille-travail-études et des services de garde éducatifs adéquats permettraient très certainement à un plus grand nombre de jeunes parents – au premier chef les femmes – de ne pas avoir à faire des choix déchirants pour accéder au marché du travail et de se maintenir en emploi, en plus de permettre de pourvoir les emplois disponibles et ceux qui le deviendront dans un avenir rapproché.
L’absence de règlementations, au Québec, visant les agences de placement, un vivier des pires conditions de travail dans lequel sont confinés des milliers d’ouvriers, dont un nombre considérable d’immigrantes et immigrants, constitue aussi un écueil important sur le chemin de la stabilisation des emplois et de la main-d’œuvre.
En ce sens, la bonification de la Loi sur les normes du travail et un salaire minimum qui permette de sortir de la pauvreté doivent aussi être considérés dans les pistes d’action du gouvernement. Il est également important que le Québec se rallie au projet de bonification du régime public de retraite (RRQ), que le reste du Canada a accepté.
Les centrales syndicales déplorent le peu d’espace qui est accordé à ces questions essentielles qui sont pourtant au cœur d’une stratégie visant à répondre à un marché du travail qui évolue rapidement. Dans ce débat qui concerne les emplois disponibles, l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre, les employeurs ont une responsabilité à laquelle ils ne peuvent se soustraire. Il en est de même de leur rôle dans le financement des différents programmes qui doivent être déployés.
À cet égard, les entreprises doivent s’engager à financer adéquatement la formation, l’accueil et l’intégration en emploi. Au fil des années, elles n’ont cessé de réclamer une diminution de leurs charges fiscales et il est déplorable que les gouvernements qui se sont succédé aient répondu positivement à leurs demandes, privant ainsi le Québec d’importantes ressources. L’éducation, l’enseignement supérieur, le perfectionnement et la formation continue ne peuvent être financés uniquement par les contribuables. Les entreprises doivent assumer pleinement leurs responsabilités sociales.
Le gouvernement doit également agir sur les obstacles qui limitent l’accès à la formation. Pensons notamment à la formation professionnelle uniquement financée à temps plein, à l’enjeu des petites cohortes en région qui ne peuvent démarrer faute de ressources financières adéquates ou aux enveloppes fermées en formation continue. L’accessibilité est un vrai problème.
Nous sommes déterminés à agir en ce sens dans l’intérêt supérieur des Québécoises et Québécois.
François Vaudreuil, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
Jacques Létourneau, président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
Québec, le 16 février 2017