Enjeux sociopolitiques

Des clarifications autour du projet de loi 47 demandées

31 janvier 2024

Bien qu’elle partage évidemment l’objectif du projet de loi no 47 (PL47), visant à renforcer la protection des élèves, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) déplore que certains aspects importants ne soient pas considérés, notamment en matière de prévention et de soutien.

De passage devant les membres de la Commission de la culture et de l’éducation, le 31 janvier, la CSQ a fait connaitre les grandes lignes de son mémoire et a plaidé pour une clarification du PL47.

« Pour nous, le projet de loi présente une approche incomplète. De plus, certaines notions qui y sont introduites mériteraient d’être clarifiées afin d’éviter des problèmes d’interprétation et d’application qui pourraient éventuellement même nuire à son objectif premier », a fait valoir le président de la CSQ, Éric Gingras. 

Dissiper l’ambigüité

Rappelons que l’enquête administrative qui a mené au dépôt du PL47 a été déclenchée en raison d’allégations concernant des situations de violence à caractère sexuel. Or, c’est la notion générale de « comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique des élèves » qui est utilisée dans le projet de loi.

« Il va sans dire que cette notion, large et abstraite, pourrait mener à des interprétations et à des applications fort variables d’un milieu et d’une personne à l’autre et, par conséquent, à une multitude de signalements pas toujours fondés. Mieux vaut clarifier pour mieux cibler les priorités d’action. La portée de cette notion doit être réfléchie au sein même du réseau, avec les acteurs du réseau. Une interprétation imposée qui ne répondrait pas aux préoccupations du terrain ne favoriserait pas la compréhension et l’adhésion », a dit Éric Gingras, qui a également rappelé l’importance du dialogue social dans ce contexte.

« Il doit y avoir une compréhension commune de cette notion dans le réseau par celles et ceux qui devront en faire l’application, sans quoi il y aura du sable dans l’engrenage et le projet de loi n’atteindra pas son objectif », a-t-il ajouté. 

Simplifier ou multiplier?

Le projet de loi confèrerait au personnel des centres de services scolaires et des établissements d’enseignement privés l’obligation de signaler tout manquement au code d’éthique et de signaler sans délai au ministre de l’Éducation toute situation concernant une enseignante ou un enseignant relativement à certaines situations.

Pourtant, de nombreux mécanismes existent déjà pour porter plainte ou faire des signalements. Pour la CSQ, le projet de loi risque d’engendrer une multiplication des voies possibles qui auront pour effet de dédoubler le partage des responsabilités et de complexifier le processus. « Alors que l’on souhaite simplifier et clarifier, ces ajouts risquent surtout de créer de la confusion. Parfois, le plus est l’ennemi du mieux », a précisé le président de la Centrale.

Les clauses d’amnistie

Le projet de loi prévoit la disparition des clauses d’amnistie dans les conventions collectives. Ces dernières permettent que des informations soient retirées du dossier disciplinaire d’une personne après une certaine période. « Cette notion de pardon et de réhabilitation existe au cœur même de notre système de justice, pourquoi faudrait-il évacuer cette possibilité des conventions collectives? », a dit Éric Gingras.

Au micro de l’animateur Paul Arcand, au 98,5 FM, le président de la CSQ a précisé qu’il ne s’agit pas de défendre l’indéfendable, mais plutôt d’offrir la possibilité aux milieux de convenir localement des modalités des clauses d’amnistie : « Présentement, le projet de loi inclut tous les comportements pouvant laisser craindre. Ça va de l’éducatrice ou de l’éducateur qui crie, par exemple, à un prof qui commet un acte grave. Il y a un équilibre à trouver. Les milieux devraient pouvoir trouver des manières d’ajuster les délais en fonction des gestes posés. Une personne qui va “péter sa coche” une fois, est-ce qu’on doit ramener ça douze ans plus tard? »

La CSQ rappelle qu’une clause d’amnistie n’empêche pas un employeur d’imposer une mesure disciplinaire sévère s’il juge que c’est la voie à suivre considérant toutes les circonstances dans lesquelles la faute a été commise à l’égard de l’élève.

POUR ALLER PLUS LOIN

Consultez le mémoire Poursuivre le chemin vers la protection des élèves préparé par la CSQ.

(Photo: Simon Clark)