Société

Allocution de Chantal Locat

25 avril 2013

Présentée lors de la conférence de presse de la CNCPS dans le cadre de la campagne Les publicités sexistes, c’est assez !

Présentée lors de la conférence de presse de la CNCPS, le 24 avril 2013, dans le cadre de la campagne Les publicités sexistes, c’est assez !


Bonjour à toutes et à tous, membres et non-membres actives dans la présente campagne de la CNCPS. Merci aux journalistes d’avoir pris la peine de se déplacer ce matin. La CNCPS veut profiter de cette occasion pour annoncer l’action nationale qu’elle a entreprise pour dénoncer les publicités sexistes.
La semaine du 21 au 28 avril 2013 a été retenue par la CNCPS comme la semaine contre les publicités sexistes. Pour cette occasion, nous invitons les groupes membres et non-membres, ainsi que toutes les personnes qui le désirent, à dénoncer publiquement et collectivement les publicités sexistes et sexualisées qui s’imposent dans leur localité, leur région ou leur territoire.
Pour cette occasion, la CNCPS a créé et produit un Post-it sur lequel est inscrit : Les publicités sexistes, c’est assez ! Ce Post-it est disponible gratuitement sur commande pour celles et ceux qui le désirent.
Les groupes et les personnes sont invités à placarder les publicités ou les affiches promotionnelles jugées sexistes et sexualisées. Qu’elles soient dans les vitrines des commerces ou à l’intérieur de ceux-ci, sur les panneaux publicitaires, dans les vitrines des bars, des institutions de leur région ou de leur localité, dans les magazines, dans la presse écrite, à la télévision, des Post-it s’en viennent…
En date d’aujourd’hui, plus de 26 000 Post-it ont été distribués dans les diverses régions du Québec.
Les groupes sont invités à nous faire parvenir des photos ou des vidéos de leur action citoyenne. Par la suite, selon les actions qui nous seront acheminées, la CNCPS initiera des plaintes formelles auprès des entreprises concernées et des Normes canadiennes de la publicité (NCP).
Un suivi sera fait en ce qui concerne cette semaine d’action auprès de nos membres, sur les sites de la CNCPS et de la Gazette des femmes ainsi que sur nos médias sociaux.
Pourquoi cette action ?
Parce que nous considérons que les publicités sexistes sont une violence spécifique envers les filles et les femmes, qu’elles ont des impacts négatifs et que la surenchère à la sexualité va à l’encontre de l’égalité entre les femmes et les hommes. La sexualisation de l’espace public, dont les publicités sexistes, est un réel problème de santé publique puisqu’elle apporte sont lot d’impacts déjà démontrés sur les filles et les femmes, les garçons et les hommes. On parle ici de problèmes de santé physique et psychologique et de violence envers les filles et les femmes (estime de soi, anorexie, obsession de la minceur, chirurgie, recours à des méthodes d’amincissement, augmentation des agressions à caractères sexuels, recours hâtif à la pornographie, augmentation d’ITS, etc.). Même si les femmes sont très majoritairement visées pas les publicités sexistes, les hommes sont à leur tour, de plus en plus visés et touchés par celles-ci.
Mais encore, pourquoi cette action ? Parce que les mécanismes d’autorégulation sont présentement inefficaces et que les gouvernements sont muets dans ce dossier.
Quelques constats
Force est d’admettre que pour une publicité sexiste retirée, plusieurs autres voient le jour. Nous sommes constamment bombardées dans l’espace public d’images ou de publicités sexistes. Les modèles jadis réservés à la pornographie deviennent une référence, à vrai dire, ils deviennent la norme en matière de publicités, de mode, de vidéos, de magazines. Bref, les codes associés à la pornographie envahissent notre culture et plus encore, les citoyennes et citoyens en deviennent otages.
Quand tu te promènes dans la rue, que tu passes devant un bar de danseuses où l’affiche extérieure est trois fois plus grande que nature, cette affiche s’impose à toutes et tous, peu importe l’âge. Nous sommes alors otages d’un système sans balise. Ce genre d’affiche n’a pas sa place.
En résumé, les publicités sexistes qui inondent notre espace :

  • véhiculent des stéréotypes sexistes à l’égard des femmes et des hommes, ce qui perpétue les inégalités entre les femmes et les hommes ;
  • proposent un contenu souvent à connotation sexuelle et n’ont pas de lien avec le produit ;
  • banalisent et normalisent la sexualité ;
  • utilisent les corps des filles et des femmes et leur sexualité pour vendre un produit, ce qui n’est rien de moins qu’une commercialisation du corps des filles et des femmes ;
  • utilisent les filles et les femmes comme « objets » plutôt que « sujets », ce qui facilitent leur manipulation ;
  • présentent un seul modèle de beauté inaccessible, jeune, mince, sexy et peu de femmes correspondent aux modèles proposés ;
  • considèrent que le seul pouvoir des filles et des femmes passe par la séduction et la sexualité ;
  • dénigrent de plus en plus les hommes ou proposent un seul modèle de beauté : jeune, huilé, bombe sexuelle, etc.

Tolérer ces façons de faire, c’est accepter la banalisation et la marchandisation du corps et de la sexualité des femmes. Accepter ces publicités, c’est être partie prenante de l’oppression que vivent les femmes et les jeunes filles. Et, on ne peut se le cacher, même si le nombre est beaucoup moins imposant, de plus en plus d’hommes sont visés par ce genre de publicité, ce qui n’est guère mieux. Un message méprisant pour les femmes et, quels messages pour les jeunes, filles et garçons, qui sont dans une phase de construction de l’identité ? Assez inquiétant non ?
Un mouvement en marche et une responsabilité partagée
Depuis plusieurs années, des groupes travaillent à contrer la violence faite aux femmes dont fait partie intégrante les images et les publicités sexistes et sexualisées.
La CNCPS veut, par son action, rappeler que l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est plus que des mots et, qu’à l’instar des Chartes canadienne et québécoise, nous devons nous assurer que l’égalité se vit dans les faits et dans notre quotidien.
Les mécanismes d’autorégulation qui existent actuellement pour contrer les publicités sexistes sont nettement insuffisants et inefficaces. Les procédures à suivre sont méconnues du public, les démarches sont longues et les sanctions peu signifiantes. La notion même de « stéréotype » pour juger la nature d’une publicité demeure encore floue et peut varier selon le ou les commissaires et les comités en présence.
Pour contrer ces publicités, il faut une volonté collective de changer les choses. Comme collectif responsable, il faut se donner les moyens d’y arriver (codes d’éthiques, lois, comité de plaintes efficace avec des définitions précises, etc.).
Nous devons faire la promotion de valeurs et de comportements qui assurent un avenir égalitaire pour toutes et tous, jeunes et moins jeunes.
La sensibilisation et la promotion de modèles égalitaires sont indispensables. Le gouvernement est capable de mettre en place de belles campagnes publicitaires contre l’alcool au volant, la violence conjugale, pour la lutte à l’homophobie. À quand des publicités contre le sexisme ? À quand une application réelle d’un programme efficace d’éducation à la sexualité dans une perspective de rapports égalitaires non sexiste et non hétérosexistes ? À quand une législation ou un code contre les publicités sexistes ? Le gouvernement a la responsabilité de garantir l’égalité entre les femmes et les hommes. Il peut à ce titre imposer des balises.
Les entreprises ont une responsabilité sociale. Elles ne peuvent pas uniquement partir avec les profits et laisser au système de santé les impacts de leurs propos publicitaires. Elles doivent faire preuve d’imagination plus créatrice, adopter des comportements plus respectueux des rapports égalitaires prônés et inscrits dans nos Chartes. Elles doivent attirer les diverses clientèles en proposant des images et des modèles diversifiés, réalistes et inspirants.
Comme société, nous avons beaucoup de chemin à faire et la CNCPS espère que ce moment relancera une réflexion sur ce que nous voulons comme société et comme environnement. Un environnement sain en est un où l’air est bon, mais aussi sans sexisme. Alors, qu’attendons-nous ?
En terminant, la CNCPS tient à remercier très sincèrement les organismes qui ont collaboré à l’organisation et à la diffusion de cette action. Il y a un comité de travail à la CNCPS qui a oeuvré très fort pour organiser cette campagne. Il s’agit de Janic Fontaine de la Maison d’hébergement pour Elles des Deux Vallées à Gatineau, de Lucie Giguère de la Maison Libère-Elles à Chelsea ainsi que de Nathalie Bissonnette et Élizabeth Massicolli de la Gazette des femmes à Québec. Nous tenons également à remercier Suzanne Dufresne, membre individuelle au Conseil d’administration  de la CNCPS ainsi que Johanne Marcotte, vice-présidente de la CNCPS et coordonnatrice de ce comité de travail sans qui cette campagne n’aurait pas autant de rayonnement.
Chantal Locat
Présidente de la CNCPSinfo@coalition-cncps