Enseignement supérieur

LETTRE OUVERTE | Pour une recherche ouverte et innovante!

22 novembre 2025

Au Québec, nous aimons dire que notre avenir passe par le savoir. Nous croyons en une université ouverte, dynamique, capable de répondre aux défis sociaux, économiques et environnementaux qui façonnent notre époque. Pourtant, un paradoxe persiste : alors que les chargées et chargés de cours représentent la majorité du personnel enseignant universitaire – près de 15 000 personnes –, leur contribution à la recherche demeure largement sous-exploitée. Ce gaspillage de talents n’est pas seulement injuste : il prive notre société d’un formidable levier d’innovation.

Par les présidentes et présidents de syndicats de chargées et chargés de cours des universités québécoises*

Ces enseignantes et enseignants contractuels ne sont pas de simples « remplaçants ». Elles et ils sont hautement qualifiés : entre 20 % et 33 % détiennent un doctorat, plusieurs ont complété un postdoctorat, et bon nombre consacrent leurs carrières à l’université. Leur expertise, souvent nourrie par une double expérience – académique et professionnelle – constitue un atout unique pour rapprocher la recherche des réalités sociales et économiques du Québec.

Pourtant, faute de reconnaissance et de financement, ce potentiel reste en friche. Une enquête récente révèle qu’une proportion significative des personnes chargées de cours serait prête à déposer un projet de recherche auprès des Fonds de recherche du Québec si on leur offrait un soutien adéquat. Les possibilités sont là, mais les moyens manquent.

Un investissement stratégique pour le Québec

Nous proposons la mise en place d’un programme de subvention novateur dédié à la recherche menée par des chargées et chargés de cours, financé à hauteur de 25 millions de dollars sur cinq ans. Cet investissement de 5 millions annuellement, modeste au regard des budgets gouvernementaux, aurait un effet de levier considérable :

  • Optimiser un potentiel existant : les universités québécoises regorgent de chercheuses et chercheurs compétents qui n’attendent qu’un signal pour contribuer davantage et venir complémenter ou consolider les équipes déjà actives;
  • Diversifier la recherche : en soutenant des projets portés par des personnes issues de parcours variés, nous favorisons des approches novatrices et des objets d’étude ancrés dans les réalités locales;
  • Consolider un enseignement à la fine pointe des connaissances : une enseignante ou un enseignant engagé en recherche transmet des savoirs actualisés, au bénéfice direct des étudiantes et étudiants;
  • Répondre aux recommandations officielles : cette initiative s’inscrit dans la continuité des avis du Conseil supérieur de l’éducation (2023) et du rapport L’Université québécoise du futur (2021), qui appellent à une recherche plus inclusive, collaborative et connectée à la société.

Un projet gagnant pour toute la société

Investir dans la recherche des personnes chargées de cours, ce n’est pas seulement soutenir une catégorie de personnel universitaire. C’est accroître la capacité collective du Québec à innover, à comprendre ses propres enjeux et à y répondre. C’est aussi favoriser la diffusion des connaissances auprès des communautés, des entreprises et des institutions publiques. Bref, c’est miser sur une université qui reflète la diversité et la richesse de notre société.

À l’heure où les défis se multiplient – transition écologique, transformations du marché du travail, inclusion sociale –, pouvons-nous nous permettre de laisser en veilleuse des milliers de cerveaux formés, motivés et déjà présents dans nos universités ? La réponse est claire : non.

Nous invitons le gouvernement du Québec, et tout particulièrement la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, Mme Martine Biron, à poser un geste fort : créer ce programme de financement dédié aux personnes chargées de cours pour ainsi libérer un potentiel de recherche dans nos universités, aux quatre coins du Québec. Cet investissement, c’est un pari sur l’intelligence collective, sur la créativité et sur l’avenir.

*Les cosignataires de la lettre :

Vincent Beaucher, président du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université de Sherbrooke
Godefroy Desrosiers-Lauzon, président du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université de Montréal
Francis Bouffard, président du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue
Marie-Josée Bourget, présidente du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université du Québec en Outaouais
Elisabeth Cyr, présidente du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université Laval
Franck Basset, président du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université du Québec à Chicoutimi
Christian Guillemette, président du Syndicat des chargés et chargées de cours de l’Université du Québec à Rimouski
Stéphane Lafrance, président du Syndicat des chargé-es de cours de l’École de technologie supérieure – Services des enseignements généraux
Beverley LeBlanc, présidente du Syndicat des chargé(e)s de cours à l’éducation aux adultes de l’Université Concordia / Concordia University Continuing Education Part-time Faculty Union
Raad Jassim, président du Syndicat des chargé(e)s de cours et instructeurs(trices) de McGill / McGill Course Lecturers and Instructors Union
Olivier Aubry, président du Syndicat des professeures et professeurs enseignants de l’Université du Québec à Montréal
Lucie Lorrain, présidente du Syndicat des chargés et chargées de cours de l’Université du Québec à Trois-Rivières
Robert Soroka, président de l’Association des professeures et professeurs à temps partiel de l’Université Concordia