Action féministe, Société
Violence conjugale : quand les femmes sont deux fois victimes
17 juin 2025
Elles ont eu peur. Elles veulent fuir. Elles sont prêtes à tout laisser derrière elles. Et quand elles ont frappé à la porte d’un refuge pour femmes victimes de violence conjugale… on leur a dit non. Pas par insensibilité. Pas par manque de volonté. Par manque de place. Par épuisement des ressources. Au final, ce sont les victimes qui se retrouvent prises au dépourvu.
Par Félix Cauchy-Charest, conseiller CSQ
C’est le cri du cœur lancé ces jours-ci par les maisons d’hébergement d’un bout à l’autre du Québec. Leurs chambres sont pleines, leur personnel est exténué, et leurs subventions ne suffisent plus à répondre à la demande. Et pendant ce temps, la violence, elle, ne prend pas congé.
« On parle de femmes et d’enfants qui fuient la violence . Qui cherchent une chance de recommencer ailleurs, en sécurité. Et elles ne peuvent pas y arriver parce qu’il manque des ressources ? C’est révoltant. », dénonce Nadine Bédard-St-Pierre, vice-présidente de la CSQ
Une crise bien réelle
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Plus de 60 000 appels ont été logés à l’organisme SOS Violence conjugale l’an dernier, un sommet historique. Les refuges, eux, n’ont pas vu leurs budgets suivre cette explosion des besoins. Conséquence : des refus, des listes d’attente, des ruptures de services. Et parfois, le silence. Parce qu’on n’a plus rien à offrir.
Certaines maisons ont dû limiter leur durée d’hébergement. D’autres ont coupé dans le soutien psychosocial. Toutes craignent ce qui pourrait arriver à celles qu’elles ne peuvent accueillir.
« Il y a des femmes qui doivent retournent chez leur agresseur faute de solution. Il y a des enfants qu’on replonge dans un milieu de vie empreint de violence, d’insécurité.. Tout ça, parce qu’on n’a pas jugé bon de financer correctement les organismes communautaires », dénonce Nadine Bédard-St-Pierre.
Des trous dans le filet social
Dans les écoles, les services de garde, les services éducatifs à l’enfance, les CLSC, les membres de la CSQ sont souvent en première ligne. Elles repèrent les signaux, tendent la main, orientent vers les bonnes ressources. Mais quand ces ressources sont à bout de souffle, tout le système craque.
C’est pour cette raison que la CSQ tient à rappeler son engagement : appuyer l’accès à des hébergements pour personnes victimes de violence conjugale, notamment par des alliances solides avec la société civile et un soutien financier accru aux organismes.
« On ne peut pas tolérer que des femmes qui ont eu le courage de se sortir du cycle de la violence, soient abandonnées en chemin. Le gouvernement doit agir maintenant. »
Ce que réclament les organismes du milieu n’a rien d’exagéré : un financement stable, prévisible, à la hauteur des besoins. De la reconnaissance. Et surtout, du respect.
Parce que dans un Québec qui se veut égalitaire, moderne et juste, il ne devrait pas être plus facile d’avoir un budget pour un troisième lien que pour sauver des vies.