Monsieur Proulx,
L’impression que votre sortie médiatique des derniers jours laisse au personnel de l’éducation est plutôt celle d’une discussion unilatérale très peu portée sur la réalité vécue dans le milieu scolaire.
Vous dites souhaiter des « conversations franches et ouvertes », je vous expose donc ma réflexion… de façon franche et ouverte.
Pour discuter, il faut être au moins deux. La dissonance flagrante entre ce que vous proposez et les besoins du personnel de l’éducation démontre un grand manque d’écoute de votre part et un manque de compréhension des véritables enjeux.
Quand vous parlez de la valorisation du personnel enseignant, votre discours élitiste est inacceptable, voire méprisant. Les élèves du Québec ont besoin de profs qui ont le temps de se consacrer entièrement à l’enseignement, qui ont des classes équilibrées, des tâches moins lourdes, des ressources adéquates pour les mener vers la réussite. Ils ont également besoin de profs qui ont des conditions de travail qui les motivent à poursuivre dans la voie qu’ils ont choisie. Ils n’ont pas besoin d’un ordre des enseignants, une structure bureaucratique inutile qui ne contribue en rien à la valorisation.
Je peux vous assurer que celles et ceux qui s’engagent dans le milieu scolaire, quel que soit le métier qu’ils exercent, sont toutes et tous motivés par la réussite du plus grand nombre d’élèves.
Mais, pour y arriver, ils ont besoin d’être soutenus par un gouvernement qui comprend leur réalité, qui est sensible à leurs besoins et qui réinvestit massivement dans sa « supposée » priorité : l’éducation.
Du côté des profs, la priorité, ce n’est pas de partager un petit-déjeuner avec le ministre ou de recevoir des prix d’excellence. Pour répondre aux besoins des élèves, ils ont plutôt besoin d’avoir en main les outils pour pouvoir travailler en collaboration avec le personnel de soutien et le personnel professionnel.
Et ce qui est si choquant dans les idées que vous mettez de l’avant, c’est que vous semblez balayer du revers de la main les problèmes réels auxquels est confronté le personnel du réseau de l’éducation au Québec et tout miser sur des idées à la pièce qui ne règleront en rien les difficultés vécues quotidiennement.
Vous dites que la patience n’est pas votre plus grande qualité. Sur ce point, nous sommes d’accord. Ce n’est pas la mienne non plus.
C’est pourquoi je suis impatiente que vous preniez le temps de vous attarder aux vrais enjeux.
Pour « bouger », comme vous le dites, le personnel de l’éducation n’a pas besoin d’un livre du ministre. Il a plutôt besoin que vous répariez les dégâts que votre propre gouvernement a créés en sous-finançant le réseau de l’éducation. Il a également besoin qu’on lui donne un bon coup de main, qu’on le valorise de façon concrète et surtout qu’on lui fasse enfin confiance pour qu’il puisse contribuer, comme il le souhaite, à la réussite éducative du plus grand nombre.