C’est un fait avéré, le mandat du gouvernement sortant a été en montagnes russes en ce qui concerne le financement des services publics. Le gouvernement qui sera prendra le pouvoir au terme de ces élections générales, le 1er octobre prochain, devra assurer un financement stable et suffisant des services publics, ce qui fait cruellement défaut depuis maintenant près de 10 ans[1].

Les coûts de système

Ce financement devra d’abord couvrir entièrement ce qu’on appelle les coûts de système, c’est-à-dire ce qu’il en coûte pour maintenir les services et les programmes actuels compte tenu de la hausse de la population du Québec et des hausses salariales. Il devra également ajouter de nouveaux investissements substantiels pour régler certains problèmes criants qui existent au sein des réseaux de l’éducation, de l’enseignement supérieur, de la santé et des services sociaux et de la petite enfance. La croissance des dépenses de mission devra donc être au rendez-vous.

Malheureusement, le rapport préélectoral, préparé par le ministère des Finances et validé par la Vérificatrice générale, présente des chiffres inquiétants. Au premier abord, cela peut être étonnant parce que l’on a beaucoup entendu parler des marges de manœuvre financières dont bénéficierait le Québec.

Le rapport préélectoral montre effectivement certaines marges de manœuvre comme la provision au fonds de suppléance et la provision au service de la dette. Aussi, le cadre financier prévoit que le gouvernement dégagerait des surplus entre 14 et 950 millions de dollars par année au cours du prochain mandat. Il y a aussi les 6 milliards de dollars accumulés dans la réserve de stabilisation.

Encore des compressions à venir?

Le problème, c’est que le rapport préélectoral prévoit une croissance des dépenses de mission (de 2,4 %, 2,9 % et 2,5 % pour les trois prochaines années) qui est inférieure aux coûts de reconduction des programmes qui sont évalués à 3,1 % par le ministère des Finances. Le cadre financier présenté dans le rapport préélectoral camoufle en réalité des compressions variant entre 700 et 1 500 millions de dollars par année pour chaque année du prochain mandat.

Ainsi, si le parti qui prend le pouvoir le 1er octobre prochain maintient les objectifs de dépenses de mission prévus au rapport préélectoral, ce serait le retour à l’ère des compressions et cela ne permettrait pas d’assurer les nouveaux investissements qui sont requis pour améliorer réellement la situation dans les réseaux.

Faire le choix d’un vrai réinvestissement

Il faut donc utiliser les marges de manœuvre existantes pour hausser substantiellement la croissance des dépenses de mission prévue au rapport préélectoral. Il faut d’abord réaffecter entièrement les surplus prévus au rapport préélectoral aux dépenses de mission. C’est la première chose à faire. On ne doit pas utiliser ces surplus pour octroyer de nouvelles baisses d’impôt ou de taxe scolaire…

Ensuite, il faut réduire les versements au Fonds des générations. Il n’est pas nécessaire d’atteindre nos objectifs de réduction de la dette 3 ou 4 ans avant l’échéance comme il est actuellement prévu. Bien financer les services doit passer avant la réduction de la dette, tout comme faire manger et habiller adéquatement nos enfants doit passer avant de considérer l’option de payer notre hypothèque en accéléré.

Il serait également approprié d’utiliser les sommes cumulées dans la réserve de stabilisation et de revenir en arrière sur les baisses d’impôt octroyées par le gouvernement sortant. Le coussin de 6 milliards de dollars de la réserve de stabilisation a été constitué à coup de compressions sur le dos des services publics puisqu’on y a versé les surplus des années passées. Son utilisation est donc légitime pour remettre à niveau et améliorer les services publics. Quant aux baisses d’impôt, elles nous privent aujourd’hui de plus de 4 milliards de dollars par année.

Se faire une tête

Dans leur cadre financier respectif, les quatre principales formations politiques ont présenté leurs orientations quant au financement des services publics. Contrairement à ce qu’on entend souvent, ces orientations ne sont pas toutes du pareil au même, loin de là. Je vous invite à aller les lire pour vous faire une tête (Québec solidaire, Parti Québécois, Coalition Avenir Québec, Parti libéral du Québec).

En tout cas, peu importe le parti qui prendra le pouvoir le 1er octobre prochain, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) sera au rendez-vous pour défendre un financement suffisant des services offerts à la population.

[1]     Le budget de Raymond Bachand, en mars 2010, a été celui qui a marqué le début de l’ère des compressions après la récession de 2009.