Des travailleuses dont le poste est aboli avant ou pendant un congé de maternité et parental ou encore à la suite de ce dernier se voient parfois refuser l’accès à l’assurance-emploi, faute d’avoir accumulé un nombre d’heures de travail suffisant durant la période de référence.

Défendues par le Mouvement Action-Chômage (MAC) de Montréal, six travailleuses ayant vécu une telle situation ont toutefois réussi à démontrer, devant le Tribunal de la sécurité sociale du Canada, que certaines dispositions de la Loi sur l’assurance-emploi vont à l’encontre du droit à l’égalité protégée par la Charte canadienne des droits et libertés.

Ces dispositions de la Loi « ont pour effet de discriminer [les femmes] en raison de leur sexe et de leur grossesse », a reconnu la juge Manon Sauvé dans son jugement.

Une brèche à colmater

« Il existe une brèche dans notre filet social, affirme la première vice-présidente de la CSQ, Line Camerlain. Un partage inéquitable des tâches liées au soin des enfants est toujours constaté aujourd’hui. Ce sont les femmes qui, en moyenne, utilisent de manière plus importante les congés parentaux. »

Actuellement, les heures d’emploi assurables utilisées pour établir l’accessibilité au Régime québécois d’assurance parentale ne peuvent être utilisées à nouveau pour une demande d’assurance-emploi. Ainsi, le fait qu’elles soient mères fait en sorte que les femmes peuvent se retrouver exclues du régime d’assurance-emploi si l’abolition de leur poste a lieu dans une période rapprochée de leur congé de maternité ou parental.

« La reconnaissance d’une discrimination par le Tribunal de la sécurité sociale est un gain important pour l’atteinte d’une véritable égalité entre les femmes et les hommes », se réjouit Line Camerlain.

Et maintenant?

Selon la juge Manon Sauvé, « la réparation appropriée est de déclarer que les dispositions [de la loi] violent le droit à l’égalité des femmes qui ont eu un enfant en les excluant du régime d’assurance-emploi lorsqu’elles perdent leur emploi. » Elle conclut qu’il appartient au gouvernement fédéral de mettre en place des mesures visant à corriger la situation.

Or, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a reçu ordre du gouvernement fédéral de contester la décision du Tribunal de la sécurité sociale. Dans une lettre du MAC de Montréal, cosignée par 12 autres organisations, incluant la CSQ, l’avocate Kim Bouchard rappelle que le premier ministre Justin Trudeau, dans sa lettre de mandat, chargeait la ministre responsable de l’assurance-emploi, Carla Qualtrough de « s’attaquer aux inégalités et aux disparités systémiques profondes qui demeurent présentes dans notre tissu social ». La ministre reconnaissait d’ailleurs que le régime actuel crée des iniquités pour les nouvelles mères. Voilà un dossier qui reste à suivre.