Montréal, le 29 mai 2018. – « Le gouvernement Couillard a bien beau doter le Québec d’une stratégie nationale de la main-d’œuvre ambitieuse qui vise l’atteinte du plein emploi, mais s’il n’améliore pas rapidement les conditions de travail actuelles du personnel professionnel des cégeps, sa stratégie est déjà mise en péril avant même d’avoir pris son envol. »
La présidente de la Fédération du personnel professionnel des collèges (FPPC-CSQ), Suzanne Tousignant, rappelle que la Stratégie nationale de la main-d’œuvre, dévoilée au cours des derniers jours par le gouvernement Couillard, mise grandement sur un meilleur arrimage entre les besoins des entreprises et la formation.
« Le ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, François Blais, responsable du dossier, ne semble pas réaliser que, s’il veut mieux adapter la formation aux besoins des entreprises, il devra pouvoir compter sur les compétences et l’expertise du personnel professionnel de notre réseau collégial. Que ce soit pour assurer la reconnaissance des acquis et des compétences, faciliter l’accès à la formation technique, élargir l’offre de formation continue à d’autres secteurs d’études techniques, faciliter l’accès aux études à temps partiel ou assouplir le processus de révision et de développement de programmes, la contribution du personnel professionnel est nécessaire », explique Suzanne Tousignant.
Des acteurs clés en nombre insuffisant
Plus précisément, cette dernière ajoute que les aides pédagogiques individuels (API), les conseillers pédagogiques (CP), les conseillers d’orientation (CO), les conseillers en information scolaire et professionnelle (CISEP) et les conseillers en formation scolaire (CFS) sont les personnes clés dont le ministre et son gouvernement ont besoin pour concrétiser les nouvelles mesures dans le réseau collégial.
« Pour ce faire, il faut qu’il y ait un nombre suffisant de ressources professionnelles dans le réseau. Mais c’est loin d’être assuré dans la situation actuelle. En effet, tout indique qu’il y aura une sérieuse pénurie de personnel professionnel dans nos collèges au cours des prochaines années, causée par deux facteurs importants, soit les départs à la retraite et les conditions de travail qui ne sont plus concurrentielles dans le réseau collégial », constate la présidente de la FPPC-CSQ.
Des départs très préoccupants
Suzanne Tousignant appuie ses prévisions sur une enquête menée l’an dernier auprès d’un certain nombre de professionnelles et professionnels.
« Nous avons sondé les conseillères et les conseillers pédagogiques, dont 220 ont répondu à nos questions. Parmi eux, 10 % ont manifesté leur intention de prendre leur retraite d’ici cinq ans. Quant à ceux qui seront toujours au travail, plus de 15 % indiquent qu’il y a de fortes probabilités qu’ils quittent le réseau collégial pour poursuivre leur carrière ailleurs. Cela veut dire qu’un professionnel sur quatre sera à remplacer durant les cinq prochaines années et, avec les piètres conditions de travail, ce sera difficile. C’est très préoccupant », mentionne la leader syndicale.
Des conditions de travail aux graves conséquences
Les conditions de travail du personnel professionnel des cégeps ne sont pas étrangères à cette pénurie appréhendée.
« Il suffit de penser à l’écart salarial négatif entre les conseillers pédagogiques et les enseignants de cégeps, ou encore à la dévalorisation des emplois que subiront dès le 2 avril 2019 les API, les CO, les CISEP et les CFS pour comprendre ce qui se passe. Ce sont là quelques-unes des catégories de personnel professionnel menacées à court terme par une pénurie. Pourtant, la contribution de toutes s’avère essentielle pour assurer le succès de la stratégie nationale de la main-d’œuvre du gouvernement », relate Suzanne Tousignant.
Une réflexion sérieuse s’impose pour le gouvernement
En terminant, la présidente de la FPPC-CSQ recommande donc fortement au gouvernement Couillard de prendre le temps de réfléchir aux conditions de travail inacceptables dans lesquelles il maintient le personnel professionnel des collèges.
« Le manque de personnel professionnel ne sera pas sans conséquences sérieuses dans le réseau collégial et risque clairement de nuire au déploiement de la stratégie nationale de la main-d’œuvre du gouvernement. Philippe Couillard et François Blais doivent en être bien conscients. S’ils veulent éviter un tel scénario, il n’y a qu’une seule voie : bonifier sans tarder les conditions de travail du personnel professionnel », conclut Suzanne Tousignant.